Olivia. Comment s’imaginer que l’enfant avec qui il jouait avait grandit, était devenue flic, et à présent, risquait sa vie et lui demandait de la sauver ? Bruce avait toujours eu du mal à comprendre comment leur chemin avaient pu se séparer et se retrouver ainsi. La vie, le destin, est parfois joueuse, et se révèle, pleine de surprise. Malgré cette année d’absence, Olivia lui faisait toujours confiance. Elle devait ignorer qu’il avait disparu. Vu l’état de la ville prison, ce n’était guère étonnant en réalité. Les gens survivaient comme ils pouvaient, et quelqu’un comme Bruce Wayne, le milliardaire aurait été la cible de nombreuses attaques s’il avait été là. Le manoir avait subit de nombreuses tentatives d’attaques jusqu’à ce que Thomas y mette fin après tout. Au moins, Olivia avait demandé l’aide de Malone, et non celle de Bruce. C’était intelligent. Très intelligent. Si c’était Batman qui avait volé à son secours, sa couverture aurait définitivement volé en miette. Malone pouvait l’aider, plus discrètement.

Reprendre du service sous les traits de Malone l’allumette l’amusait. Cela faisait des années qu’il avait plus ou moins abandonné le travail d’infiltration, trop long et souvent dangereux. Il avait trop d’occupations avec son fils, pour continuer un tel travail. Mais il avait fait vivre le personnage, payant des petites frappes pour qu’ils prétendent l’avoir vu, avoir commercé avec lui, histoire que le personnage soit bel et bien vivant dans l’esprit de la pègre, que sa silhouette demeure familière. Entretenir l’existence du personnage fictif était primordial. Il ajusta sa fausse moustache devant la glace, avait déjà appliqué le maquillage qui modifiait son aspect et le rendait méconnaissable. Le grand truc consistait à concentrer le regard sur des détails comme la moustache ou ce grain de beauté à côté de l’œil, ou encore ces lentilles changeant son regard bleuté en un regard vert. A cela, manquait l’accessoire indispensable, l’allumette calée au bord des lèvres avec laquelle il jouait sans cesse.

Vêtu d’une veste en cuir usée, d’un pantalon sombre, usé lui aussi, et d’une casquette à la Peaky Blinders, qu’il avait renforcé en métal, il prit la vieille moto de Malone et roula jusqu’au repaire historique où Olivia et lui se retrouvaient dans le passé. Il connaissait les lieux, même s’ils avaient changés, comme la route pour y parvenir. Elle ne fut pas sans obstacles, il traversa tout de même plusieurs territoires, croisa plusieurs gangs, mais Malone était un type apprécié, copain avec tout le monde, même en ces temps compliqués, on le laissa passer sans trop lui taper dessus même si certains furent tentés. Bruce préférait ne pas trop perdre de temps, et glissa quelques vannes par ci par là, afin d’obtenir la sympathie et le laisser passer tant désiré. Malone était comme ça, alors que Batman aurait dû briser des membres pour retrouver Olivia. Parfois, la douceur était préférable à la force.

« Je crois qu’on ne trouva pas de café à cette heure-ci. » murmura-t-il en apparaissant, sortant de l’ombre, retrouvant sa vieille amie. Olivia paraissait fatiguée, mouillée et souillée comme si elle était tombée dans une déchèterie au passage. Comme Bruce avait de nombreuses fois fait des chutes guère plus sympathiques, il ne la jugea pas, la débarrassant simplement d’une vieille pelure d’orange nichée dans ses cheveux. Il déplaça l’allumette, la décalant à droite. « Dis-moi ce dont tu as besoin. »

Malone fit glisser l’allumette d’un coin de sa bouche à l’autre puis il eut une expression faussement déçue. Malone pratiquait l’humour chose que faisait très rarement Batman, et quand il le faisait, c’était de l’humour si noir qu’il ne faisait rire personne. Malone mâchonnait son allumette et montrait des signes d’une certaine assurance, du charme du gangster au bagout. Un rôle au fond qui plaisait à Bruce, il avait passé son enfance à regarder des films noirs et le personnage de Malone l’allumette était un hommage criant à Bogart. « Dommage, je t’aurais payé un verre, beauté. » Alors Malone était parfois aussi charmant qu’il en avait l’air, parfois même séducteur, chose que Bruce savait être également. Des rôles de compositions dans lesquels il se sentait autant à l’aise. Parfois la noirceur complète, absolue de Batman, l’engourdissait et il avait besoin de relâcher la pression quitte à avoir la réputation d’être un coureur de jupon sans cervelle. Bien sûr, avec sa vieille amie, ce n’était pas de la drague bête et méchante, plus de vieilles blagues qui s’échangeaient.

Parce qu’elle savait ou se doutait, de qui était sous le masque, comme il savait pour cette double vie qu’elle menait. En dépit des masques, des rôles joués, ils se connaissaient par cœur. Deux enfants ayant grandit ensemble, ayant joué ensemble, rêvés ensemble, pleurés ensembles. Il se souvenait de son soulagement quand Olivia avait paru des semaines après la mort de ses parents, il avait cru ne jamais la revoir. Bien sûr après cela, il avait changé. Il était taciturne, ne s’intéressait qu’aux criminels et à comment les coincer. Peut-être qu’il avait influencé Olivia aussi. Aurait-elle choisi une telle carrière s’il n’avait pas constamment voulu jouer aux détectives pour s’entrainer ? Il se souvient d’avoir relevé les empreintes de son amie à l’époque, d’avoir même fait des tests ADN. Ils étaient si précautionneux à l’époque et si naïfs à la fois.

« J’ai une planque, je sais pas si elle est encore praticable. Je veux dire s’il y a l’eau et le chauffage mais l’immeuble est encore debout et il est en zone neutre. Enfin neutre, disons que les gangs n’osent pas s’approcher de la zone où patrouille Batgirl. » Il lui adressa un clin d’œil. La Batfamily avait réussit à tenir un maigre quartier mais il espérait qu’ils gagneraient plus à mesure qu’ils remporteraient des victoires. Les temps étaient sombres mais pas encore totalement désespérés. « Tu as bien fait d’appeler. » dit-il fermement, il n’était pas question qu’elle court plus de risque encore. Il observa son amie qui paraissait épuisée, Richard avait eut l’air d’avoir encore foi. Olivia avait-elle encore foi en l’avenir ? Il espérait que oui. Le moral était important dans ce genre de combat. Apokolips le lui avait rappelé durement.

Malone est venu seul, évidemment, et ce ronron n’est pas le sien. Il n’a pas pour habitude de laisser le moteur tourner, habitude de criminels. L’un d’eux avaient été suivi, probablement elle, à moins qu’ils ne ratissent le quartier. Il avait néanmoins une solution pour cela, sa moto qui les attendait. « J’ai bien un véhicule mais pour monter dessus tu vas devoir te changer. Ces cheveux blonds sont trop reconnaissables. » Il ne comptait pas lui demander d’enfiler une perruque ou de changer sa couleur de cheveux, il lui tendit un casque de moto ainsi qu’une tenue en cuir adéquat. L’expert en déguisement qu’il était avait prévu sa passagère évidemment. La tenue était moulante, un peu voyante, mais faisait plus criminelle que flic, c’était l’idée du moins. Olivia devait changer de look le plus possible.